CRAAG de Bouzaréah : Une sentinelle contre les séismes du nord de l’Algérie
Le Centre de recherche en astronomie, astrophysique et géophysique (CRAAG) de Bouzaréah, situé sur les hauteurs d’Alger, est le sigle le plus connu des Algériens, c’est lui qui annonce et donne l’intensité des séismes en Algérie.
Issu des différentes restructurations de l’ancien Observatoire d’Alger, ouvert en 1890, le CRAAG, installé dans l’ancien siège de l’Observatoire, assure depuis 1987 une mission de service public à travers « la surveillance sismique du territoire ». « La surveillance continue de l’activité sismique au nord du pays est la principale mission du CRAAG. Cette surveillance est une étape fondamentale dans la réduction du risque sismique sur le cadre bâti et la population », souligne un chercheur du GRAAG, Mohamed Hamdache.
Le Centre, qui emploie une centaine de chercheurs dans plusieurs domaines (sismologie, astrophysique et géophysique) chasse les séismes en permanence grâce à un réseau constitué de 80 stations réparties à travers les wilayas du nord du pays. Cette surveillance ne date pas d’aujourd’hui : elle a été inaugurée en 1910 avec l’ouverture de la station sismologique de Bouzaréah, à l’initiative de l’Observatoire d’Alger, qui s’était doté de trois autres stations (Chlef, Relizane et Sétif) jusqu’en 1958, précise M. Hamdache.
Les stations de surveillance des séismes
Pour autant, la majorité des stations de surveillance des séismes ont été installées au lendemain du séisme d’El Asnam, qui avait dévasté la région de Chlef le 10 octobre 1980 à 13h25, avec une magnitude de 7,3 sur l’échelle ouverte de Richter, avec un lourd bilan de 2.633 victimes, indique-t-on au CRAAG. Après les 32 stations de surveillance mises en service en 1990, l’établissement a été obligé de procéder, à partir de 1998, à la réinstallation de 35 stations télémétrées à cause « des sabotages perpétrés par les terroristes durant la décennie noire », précise-t-on. Ensuite, « le développement technologique nous a obligés à renouveler notre parc par l’acquisition de 45 stations digitales en 2006 », ajoute-t-on de même source.
Son fonctionnement
Grâce à ce réseau, le CRAAG enregistre toute l’activité sismique dans le nord du pays, une zone sismique connu des spécialistes. Les données sont recueillies au niveau du « service central de surveillance sismique du territoire » dont le laboratoire est installé au sous-sol au siège de Bouzaréah, qui occupe le point le plus culminant de la ville. Le hall du labo ressemble à un musée : les fiches techniques grand format des principaux séismes vécus en Algérie sont accrochées aux murs. La première affiche est consacrée au séisme du 2 janvier 1365, qui a « détruit » la ville d’Alger avec cette légende : « Premier séisme connu dans l’histoire de l’Algérie », en se référent aux écrits d’un chroniqueur et voyageur arabe. Le laboratoire est aménagé en bureaux avec des écrans géants et de grosses machines comme décor dont le rôle et le fonctionnement ont été expliqués lundi dernier par le sismologue Beldjoudi à une délégation de l’Assemblée populaire de wilaya d’Alger (APW), qui prépare un séminaire en février sur l’extension urbaine dans la capitale, avec la participation du CRAAG en ce qui concerne les normes parasismiques de construction.
Surveiller pour réduire le risque sismique
Les écrans géants, qui sont reliés au réseau des stations de surveillance, captent et affichent en temps réel un signal à chaque séisme et les données sont transférés vers les calculateurs avant que les chercheurs ne les récupèrent pour les analyser, explique le Dr Beldjoudi. « Dans les vingt minutes, qui suivent l’alerte d’un séisme de forte magnitude, un bulletin est envoyé au ministère de l’Intérieur et des Collectivités locales (la tutelle du Centre), à la protection civile pour l’orienter vers les lieux de la catastrophe et à l’agence APS (Algérie presse service) pour la diffusion rapide de l’information », ajoute-t-il.
Avant de quitter les lieux, la délégation de l’APW a constaté que l’écran suspendu au-dessus de l’entrée du « labo » affichait un signal discontinu en vert et la carte géographique représentant le nord du pays au fond de l’écran permet de comprendre qu’un séisme a été enregistré du côté de Blida, qui a connu une intense activité sismique ces derniers mois. « Le séisme est d’une faible magnitude », rassure-t-on. « Nous enregistrons entre 80 et 90 séismes en moyenne mensuelle. La plupart des séismes captés, comme ceux d’une magnitude de 0,1, ne sont pas ressentis par la population, mais pour nous, ils ont une portée scientifique. Nous les enregistrons, les étudions et en publions les résultats dans des revues scientifiques », indique M. Hamdache.
L’efficacité du réseau algérien de surveillance sismologique
Le réseau algérien de surveillance sismologique a véritablement prouvé son efficacité à l’occasion du tremblement de terre de Zemmouri (Boumerdès) le 21 mai 2003, qui a fait 2.273 morts, d’après le CRAAG. « Le réseau de surveillance a enregistré le séisme de Zemmouri et ses 7.000 répliques, dont 6.000 jusqu’à janvier 2004. Les résultats ont été analysés et consignés dans un livre produit par le centre », souligne le chercheur. Grâce également à ce réseau, le centre élabore et actualise les cartes de sismicité de l’Algérie du nord sur la base desquelles il dessine des cartes sur des probabilités de séismes sur une période de dix ans. « Ces cartes sont très utiles dans l’établissement des normes de construction parasismique. On ne peut pas réduire le risque sismique sur le cadre bâti et la population, sans le respect obligatoire de ces normes », a souligné M. Hamdache.
Au séminaire du mois de février prochain, l’APW d’Alger se propose de sensibiliser les parties concernées à la nécessité de respecter les normes parasismiques dans l’extension urbaine d’Alger. « La tâche est grande, elle paraît parfois complexe, mais elle n’est pas insurmontable », estime à ce propos M. Hamdache.
[via elmoudjahid.com]